Le boomerang des mots-balles, ou le déni de la sagesse universelle

Michel Le Net

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Deux aspects essentiels s’attachent aux caricatures blasphématoires : la liberté de les diffuser, et l’approbation des autorités politiques du plus haut rang sur leur caractère.

Concernant le premier item, entre gens de bien, tous semblables et tous différents, on devrait approuver. Des esprits aiment ce qui relève de l’excès. Ils achètent les écrits. Des médias le diffusent à souhait. Que les adeptes aux caricatures vivent leur vie. À chacun ses goûts et ses couleurs. Que ceux qui n’aiment pas, passent leur chemin. Si leur regard rencontre l’épreuve blessante, qu’il se détourne. Cependant, l’affaire s’avère plus délicate qu’un fait divers auquel elle devrait normalement se rattacher, puisqu’elle met en œuvre des forces obscures qui lui confèrent un pouvoir explosif.

On s’interroge d’abord sur le sentiment du peuple profond, celui du « populo qui a des réflexes saints, et qui ne se trompe pas souvent », comme l’affirme le Général de Gaulle. Ressenti qui prend sa source dans notre culture millénaire, que complète l’expérience et la pensée des principaux acteurs de notre Histoire. Préalable universellement partagé : il n’y a pas une personne au monde qui ne sache que tout ce que nous disons, ou nous faisons, nous revient par un effet boomerang. Il en est ainsi particulièrement pour les mots-balles1. Machiavel (xvie siècle), théoricien des armes, avertit qu’il faut se garder comme d’un meurtre de blesser l’amour-propre d’autrui, à moins de s’attendre à mourir en retour. Un siècle plus tard, La Bruyère écrit que le langage du mépris est de toutes les injures celle qui se pardonne le moins. Elle rend l’homme irréconciliable. Et qui ne connait pas Les Aventures de Télémaque (1699), écrites par Fénelon à l’adresse des princes appelés à gouverner, un des livres de la littérature française les plus lus au monde pendant deux siècles. L’auteur rappelle au roi que « ses moindres fautes sont d’une conséquence infinie, parce qu’elles causent le malheur des peuples, et parfois pendant plusieurs siècles : il doit réprimer l’audace des méchants, dissiper la calomnie. Ce n’est pas assez de faire le bien, il faut encore empêcher les maux que d’autres feraient s’ils n’étaient retenus. » Plus proche de nous, ne dit-on pas que, piqué au vif par Barack Obama lors d’une réunion publique, Donald Trump décide de se présenter à la prochaine présidence pour laver l’affront. Socrate, deux mille ans plus tôt, rappelle qu’à terme c’est le malheur qui punit la mauvaise orientation des consciences. Son contemporain Isocrate, père de la philosophie, avance qu’un homme doit être courtois et modéré, exprimer une opinion adéquate aux circonstances du moment.  Marc Aurèle, un peu plus tard, renchérit : « Souviens-toi que tu es né pour faire des actions utiles à la société. C’est ce que la nature de l’homme demande. » Suivant une même expérience de nos semblables, l’homme d’État chinois Su Shi (xi e siècle), écrivain à ses heures, nous dit que l’homme courageux et talentueux a une retenue qui dépasse celle des gens ordinaires. Il comprend que certains peuvent ne pas supporter des outrances. Quand l’homme a été humilié, il tire son épée et frappe. Il est vrai que mille six cents ans avant lui, Confucius enseignait que la hauteur et la vigueur d’une civilisation peuvent se voir dans le comportement d’une personne. La politesse est l’empreinte de la culture d’un pays. Aujourd’hui même, Toshiro Isogushi, humaniste japonais, confirme que l’humiliation est la mère de toutes les guerres, de toutes les barbaries, du chaos universel. Enfin, avec toute la sagesse des hommes de la terre, on dit dans les campagnes qu’on ne plaisante pas avec des outils tranchants… Unanimes constats planétaires.

Cependant, puisqu’il apparait aujourd’hui que les bases immémorielles à partir desquelles se construit une société ne valent guère mieux que roupie de sansonnet, qu’en est-il des conséquences de la diffusion des dits écrits, « autorisés » par ce mot magique de liberté ? « Rien n’est plus important que la vie humaine ! », s’exclame le Président. On applaudit ! Dans le même temps, il crie haut et fort « Nous ne renoncerons pas aux caricatures ! » Là, on ne comprend plus. Nous savons, il sait, et lui plus que tout autre, qu’il s’agit là d’un sujet qui porte en lui-même les circonstances de la vie et de la mort, et qui ne doit pas être traité à la légère. Alors ? Léon Blum écrit, en 1945, : « Toute société qui prétend assurer aux hommes la liberté, doit commencer par leur garantir l’existence. » On est au cœur du dilemme. Caricatures obscènes, donc morts à la clef. Ses disciples ont-ils perdu la mémoire, et renié le Père ? Le Jyllands-Posten, quotidien danois qui s’est le premier engagé dans cette voie morbide il y a quinze ans, en tire la leçon. Sa rédaction refuse de publier de nouveau de telles productions, comme de s’associer à toute opération de même nature. « Aucun dessein ne vaut une vie humaine ! », proclame -t-elle ! Sentiment partagé par l’ensemble des nations éveillées. Lucidité qu’aurait approuvée l’ancien homme d’état français.

Cependant, il est une fraction des nôtres qui reste fermée au constat. Pour ses adeptes, cette liberté d’expression est intangible. Quiconque la conteste est voué aux gémonies. Imaginer que l’autre puisse penser, donc agir « autrement », est faiblesse. L’empathie ne fait pas partie de leur moi profond. Et cette entité veut dicter sa loi. Cependant, il suffirait de peu pour resserrer l’écart des esprits, et que ne se poursuive pas la litanie des cérémonies funèbres. Deux cents cinquante vies ont été sacrifiées sur l’autel des incompréhensions. La sagesse des peuples demande qu’elle soit partagée par le politique. Ainsi, ne récusons pas la liberté d’expression, elle demeure un pivot de notre mieux vivre. Mais soyons lucides et pragmatiques, sans baisser la culotte, bien au contraire, tant agir ainsi est signe de maturité politique, donc de progrès pour tous. Aucun chef d’État étranger n’a succombé à cette funeste arrogance. Cette attitude, reflet du bon sens populaire, suppose l’application de deux principes immédiatement applicables :  admettre la diffusion de l’offense (la loi), mais ne pas la cautionner par l’état (la sagesse, en amont de la loi). Le Président doit se situer à l’écart de la diatribe. Permettre de la diffuser, oui. Cautionner l’offense, non. Sinon, serait-ce à dire que cinq mille ans d’enseignement de la gouvernance du souverain bien sont à rejeter ? Alors, l’enseignement des anciens nous pénétrant, les centaines de millions de musulmans qui nous insultent pourraient s’éveiller à ces principes de vie qui nous commandent, et progressivement nous comprendre. Nous valons mieux que ces anathèmes clamés à notre encontre, dont le boycott de nos produits en est une résultante. N’avons-nous pas aujourd’hui d’autre urgences que de nous offrir en toute conscience ce déluge d’inimitiés, appuyées par l’affaiblissement de notre économie ?

Ce faisant, nous échapperons à cette clamation attribuée à Madame Roland en 1793, montant à l’échafaud : « Ô Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! »

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  1. On ne se méfiera jamais assez de la charge portée par certains mots, d’apparence bénins, mais qui imprudemment utilisés peuvent entrainer des conséquences dommageables insoupçonnées. Il en est ainsi des dérivés du verbe « séparer », dont l’abominable « séparation » qui porte en lui tous les malheurs du monde…

     Michel Le Net, haut fonctionnaire honoraire, est chercheur en sciences humaines ; essayistes et auteur. Il a écrit une quinzaine d’ouvrages sur différents aspects du comportement individuel, dont les fondamentaux de la persuasion sociale qu’il a mis en pratique dans sa vie professionnelle. Son dernier livre Ça pique ! Secouons nos neurones (J. Picollec, éditeur), donne la parole à une femme du peuple, qui s’exprime librement sur les faits majeurs de notre actualité, dont celui traité dans le présent article.

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Le Tire-sève, ou l’âge actif !

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Michel Le Net

Chacun d’entre nous connait dans son entourage un personnage de grand âge qui étonne par sa vivacité. Ainsi, tel résident habite au cinquième étage, mais monte et descend l’escalier comme un quadra, alors que le double l’habite. Converser avec lui abreuve ses locuteurs d’idées novatrices et joyeuses. À contrario, beaucoup de nos sexagénaires montrent qu’ils sont manifestement sur le versant de la vie, et attendent avec résignation l’échéance programmée. Entre ces deux profils extrêmes, nos compatriotes se distribuent suivant un engagement plus ou moins prononcé à participer à une vie active notable. Mais qu’en est-il plus précisément ? L’analyse de nos semblables sur ce point conduit à nous répartir en trois groupes.

    Le premier (un pour cent du tout) réunit ceux qu’on appelle les mordus de la vie. Notre résident en fait partie. Ils concernent les nôtres mus par une sorte d’appel à vivre pour faire toujours plus et mieux. Leur organisme est semblable à un ressort tendu à l’extrême. Ce qui suppose un état de tension intériorisé souvent permanent. Une passion l’habite, qui le commande jusqu’au bout de sa pulsion.

    On trouve ces personnes « qui ne détèlent jamais » dans tous les horizons. On les appelle des boulots-boulots. Ou, mieux, des férus du feu sacré. Aux extrêmes, les « moi-d’abord » aspirent à toujours plus de pouvoir ou d’argent. À contrario, les « lui-d’abord », espèce rare, font dans les belles œuvres, ou rentrent au couvent. Leurs adeptes ont la révélation qu’une bonne santé est un don, qu’ils doivent impérativement compenser par leur part de progrès au profit de notre humanité, dont une large attention portée à nos semblables. Là est le mobile de leur générosité. Divines natures !

    Ainsi, l’architecte Niemeyer (Brasilia) rejoint chaque jour son bureau au-delà de ses cent ans ; un chercheur du même âge poursuit gratuitement ses travaux à Saclay. Un avionneur de renom a construit lui-même son avion, et invite de futurs pilotes ou amis à partager sa passion, au-delà de ses 85 ans. Pour eux, le jour et la nuit se confondent. Ils ne font qu’un avec leur choix de vie. D’autant plus admirable s’il est consacré au bonheur d’autrui. Classique en politique où l’attrait du pouvoir est une drogue manifeste, la liste des illusionnistes est sans fin. Mieux, dans les arts, où l’âge révèle chez les meilleurs la toute-puissance de la créativité. Goya, Titien, Michel-Ange, Goethe, Homère et plus, transgressent le plafond du beau. Mais on touche là l’exceptionnel. Il n’empêche. Ces exemples hors norme nous révèlent que ces heureux gâtés par le destin ont bénéficié dès leur naissance d’un tire-sève génétique. Mais entendons-nous bien, on parle ici de longévité, pas nécessairement de vie à l’eau de rose. Il s’agit d’un tout autre sujet…

    On peut inclure dans ce groupe les collectionneurs viscéraux, qui réunissent des objets semblables qui les ont attirés toute leur vie. Ainsi rencontre-t-on des amateurs d’avions, de locomotives, de voitures, de bornes de routes anciennes, comme de timbres, de cartes postales, de monnaies, d’épinglettes, de pots de yaourt, de canettes de bière, de coquilles d’œufs ou de cornes d’auroch. Pour notre compatriote, sa tasse de thé est la généalogie. Cela fait trente ans qu’il est sur l’ouvrage. Il remonte jusqu’à Henri IV, actes notariés en main. Et bien que l’informatique aide beaucoup, il passe des journées entières en bibliothèques et autres labyrinthes administratifs pour pousser ses recherches plus avant. Il est heureux d’en faire profiter les membres de sa nombreuse famille, qui trouvent là ce qu’on appelle l’identité de leur ascendance. Ça les rassure, dans ce monde de plus en plus déshumanisé.

    Mais il n’est pas donné à tout le monde de faire comme cela, peut-on rétorquer. Ne faut-il pas être « instruit », ou poussé par on ne sait quelle force intérieure pour aller ainsi de l’avant ? Oui et non. Nous pouvons avoir ce privilège en nous, comme notre référent. Il est alors inscrit dans notre composant génétique. Et nous suivons docilement ce que dicte notre moi profond. Dans ce cas, pas de problème. Nous sommes naturellement portés à vivre longtemps et heureux, du moins à cet égard ! Depuis deux mille ans, on sait que nous sommes programmés pour vivre jusqu’à cent vingt ans. Bien sûr, si l’on évite de trop contrarier la nature, et avec le concours d’une certaine chance qui nous permet de passer entre les gouttes… Mais si une telle faveur ne nous a pas comblés dès le berceau, que peut-on faire ? Si le sort nous a ignorés sur ce point, nous faisons partie de la grande communauté de ceux qui traversent la vie, plus ou moins ballotés par ses aléas, commandant parfois leur destin, ou subissant des évènements qui nous échappent. Notre ressort de vie est à moindre tension.

    Nous entrons là dans le deuxième groupe (quatre-vingt-dix pour cent) des « plutôt » satisfaits de la vie, un peu maîtresse de nos choix. On pourrait dire aussi des intermittents du feu sacré, mariés avec notre passe-temps favori, mais avec un certain éloignement. Bridgeurs, échéphiles, golfeurs, fanas de la boule et du vélo, font ainsi la part des choses. On peut leur associer les innombrables bénévoles en tous genres que nous connaissons. Et tout ce monde qui nous entoure plus ou moins scotché à des occupations choisies. Ainsi, un million et demi d’associations réunissent des bonnes volontés de toutes natures. Les communes bouillonnent de volontaires dévoués à leur prochain.

    Ou bien, nous ne pouvons guère agir sur le cours des évènements qui nous concernent au plus près. Ce troisième groupe (neuf pour cent) est habité par les forçats de la vie, purgatoire avant l’heure de nos frères qui n’y sont pour rien. Ou qui baissent les bras avec le sentiment que leur temps est dépassé et qu’ils ont tout donné dans leur travail. Curieusement, on rencontre là des personnages qui ont occupé les plus hautes fonctions dans leur vie active, dirigeants de société, directeurs d’administration, illustres au temps de leur splendeur, moins peut-être en politique où le virus mégalomaniaque est souvent permanent. Quel gâchis, alors que chacun renferme un trésor de connaissance et de savoir-faire. Chez eux, la sève est tarie. Le ressort est cassé. Leur devoir quotidien est d’aller acheter le pain et le journal, et pour les chanceux, prendre la petite dernière à la sortie de l’école. Leur faculté d’échapper au noir de l’existence est réduite. Fin de parcours dans l’évolution de la descendance humaine ? Application de la sélection naturelle ? De ce fait, et plus particulièrement pour ceux dont les ressources sont réduites, notre générosité leur est acquise. Par nous-mêmes en premier, et par ceux que nous avons portés au pouvoir à cet effet. Mais qu’en est-il ? Chaque jour, on dénombre deux suicides quotidiens chez nos agriculteurs et nos éleveurs, à qui l’on doit en premier notre pain quotidien. Le dur et continuel labeur de la terre et de l’élevage leur font oublier vacances, congés et repos. Et pas de révolution en vue. Comment avons-nous pu atteindre un tel seuil d’indifférence pour en arriver là ? Vaste question, aurait dit qui vous savez. Même constat pour les fins de vie en Ehpad, où nous parquons nos vieux dans des mouroirs, où nous exilons la sagesse. Abomination, alors que de sages initiatives* ne demandent que du courage politique pour les mettre en œuvre !

    En résumé, beaucoup des nôtres ne me sentent pas naturellement attirés par quelque chose à faire qui les passionnerait, et mieux changerait le monde. Ils appartiennent plutôt à la deuxième catégorie, celle pas trop comblée, mais pas désespérée non plus. Alors, qu’elle solution ? La recette nous appartient, sans avoir loin à chercher. Chacun d’entre-nous est le meilleur au monde sur un aspect particulier. À nous de trouver la pépite de notre vie, à faire des jaloux par ceux qui vous envieront d’être en si bonne santé sur ce point-là. Parlons-en à nos enfants, nos jeunes générations sentent ces choses-là différemment de nous. Après avoir bien œuvré dans notre emploi professionnel, nous pourrons atteindre la sérénité dans une autre occupation, prolongeant tel aspect de nos compétences. Mais il ne suffit pas de s’adonner passivement à une occupation égocentrique, comme un spectateur au cinéma ou un sportif du dimanche. Il faut avant tout être responsable d’un bout de pouvoir qui nous oblige à résoudre chaque jour la préoccupation du moment. Gérer le club de boules du quartier. Préparer les repas des anciens. Organiser leur prochaine visite au château du coin… Nos neurones, petites cellules grises qui sont le siège de notre pensée, se reproduisent en permanence, quel que soit notre âge. Elles attendent qu’on les booste pour nous donner une nouvelle ardeur. Comme nos jeunes qui dépasseront ce qu’on leur enseigne. Alors, ne lésinons pas. Donnons-leur du grain à moudre. Si la santé nous est donnée, ne décrochons jamais !

    Mais, est-ce qu’il n’est quand même pas un peu tard pour convertir notre soixantaine passée en excentriques des ordiphones ? Il est vrai que plus tôt on y pense, plus tôt le passage à l’après travail professionnel se fait bien. En bref, sommes-nous des mordus de la vie ? Des forçats de la vie ? Non, encore. Alors, nous relevons de l’entre-deux, pour qui tout est permis. Il n’est jamais trop tard pour y réfléchir. À nous de trouver bientôt le tire-sève d’une heureuse longévité.

Michel Le Net

Administrateur de République exemplaire

michel-le.net@republique-exemplaire.eu

(01 46 66 24 65 / 06 72 71 36 49)

Antérieurement Délégué général du Comité français d’éducation pour la santé (CFES), intégré dans l’actuel Santé publique France.

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* Sujet traité par l’auteur dans « Fins de vie : l’échec de notre humanité », dans Ça pique ! Secouons nos neurones… (Éditions Jean Picollec).

Président, comment choisir le meilleur ?

Libre opinion

Michel Le Net
Administrateur de République exemplaire

Préalables :

1 – Aux xviie et xviiie siècles, le monde parlait français. Le monde pensait français. Le monde lisait français. Le monde était français. À la cour de Russie, Catherine II montrait l’exemple. Le Beau, le Bien, le Vrai avaient notre adresse. À cette époque, on francisait systématiquement les mots étrangers, pour ne pas écorcher notre langue, noms propres compris.

2 – Depuis cette époque, comparés au nombre des habitants des nations proches (Allemagne ; Grande-Bretagne ; Espagne ; Japon…) et toutes choses égales par ailleurs, nous devrions être aujourd’hui 150 millions de Français, au lieu de la moitié ! Avec une population correspondante au siècle dernier, nous aurions évité les deux dernières guerres mondiales.

Deux constats parmi mille autres qui nous interpellent au moment où s’annoncent des élections majeures. À défaut, nous mériterons une nouvelle fois cette incartade célèbre parue dans le Times à notre adresse, pendant la guerre de 70 : « Vous êtes des lions conduits par des ânes ! »

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Nous sommes d’accord. Nos élus ne sont pas choisis pour leurs capacités à bien gérer nos affaires, sinon, ça se saurait. On voit ce que donne le système en place. On entend ce que disent les tenants du pouvoir. Résultat, en Italie, pays frère, 90% du public ne veut plus voir ces drôles à la télévision. On doit penser à d’autres façons de sélectionner les talents appelés à nous gouverner. À bien décider lors de graves circonstances.

Pourquoi fait-on si mal ? Déjà, du temps de Périclès le régime politique était juridiquement une démocratie, mais dans les faits le pouvoir appartenait au dirigeant le plus en vue par la puissance de la parole. Mille guerres et révolutions depuis lors, et on en est toujours là ! De fait, s’il est une organisation dont l’extrême qualité de la gouvernance s’impose, c’est bien celle de la nation française. Cependant, la sélection des meilleurs candidats pour s’y employer est établie à partir de critères qui relèvent de tout, sauf du principal.

Ainsi, tel homme gagne après une partie de chausse-trapes dont le paraître occupe 90 % du succès : 50 % pour la gestuelle et 40 % pour l’intonation du verbe. Le contenu de ce dernier est accessoire. L’intelligence de la décision et le courage de la prendre ne font pas partie du processus de sélection.

À des moments clés de notre histoire, l’un et l’autre font défaut. Bien des désastres ont été le fait de mauvaises décisions, prises aux mauvais moments, par des dirigeants non préparés à des échéances dramatiques. Un chef d’État entre les mains d’un entourage hargneux nous entraîne dans le fracas du désastre de 1870. Un président du Conseil d’apparentes qualités ne fait pas le poids face aux évènements qui le dépassent en 1940. En huit jours, la France jette l’éponge. Il s’ensuit une explosion cataclysmique à quatre-vingts millions de morts. Et la litanie de telles insuffisances est bien longue. Il est avancé que nous pourrions être une espèce répétitive de nos erreurs… Et à l’image de l’Univers qui grandit et ne semble pas regarder son passé, on peut imaginer que l’on fait de même. Demain efface hier. Et l’on nous dit que le système s’accélère. Alors bonjours les dégâts à venir ! Mais on n’est pas obligé d’y croire. Revenons sur terre.

Depuis plus de deux mille ans, la gouvernance d’État pose problème. Des montagnes d’ouvrages sur le sujet encombrent les bibliothèques. Les avis des plus « éminents » constitutionnalistes alimenteraient une encyclopédie sans fin. Le constat est lumineux, partagé par tous les politologues. Et plus encore par les opinions publiques qui se succèdent, leur amertume renouvelée : notre système de sélection est inefficace. Il faut remettre en cause la procédure de qualification de nos premiers dirigeants, chef de l’État et maires en tête. Quel que soit le moment où l’on parle, avant, pendant ou après telle élection, l’actualité s’empare des prochaines échéances. Les partis entrent en état de fébrilité maximale. Comment placer son représentant sur la meilleure ligne de départ ? À quel endroit, et à quel moment ? Dans quelles conditions ?

Tels sont les évènements qui vont encombrer les ondes et les colonnes des journaux tout au long des temps qui s’annoncent. Sans que l’on perçoive si faire ainsi nous assure d’un bon choix final. Aujourd’hui, les partis sont maîtres des lieux. Un candidat émerge à l’issue de circonstances fluctuantes, qui mettent en avant ses capacités à promouvoir des intérêts corporatistes. Mêmes causes, mêmes effets. De mauvais résultats ! Et pourtant on est prévenus, mais rien ne change. Le lobby du pouvoir verrouille à tout-va. Une tête dépasse, et la massue lui tombe dessus ! Le Général1 partageait la vision de La Bruyère (Les Caractères) : « L’esprit de parti abaisse les plus grands hommes jusqu’aux petitesses du peuple ». Il avait des idées claires sur le sujet. Ouvrir une formation à de futurs hommes d’État ne lui aurait pas déplu. Bien évidemment, à des personnages hors partis. Il aurait volontiers fondé une « Société d’encouragement pour le développement de la race présidentielle », afin que les clans sectaires n’aient plus le monopole des haras ! Liberté aux candidats non partisans, et vive l’atypisme, tant il méprisait le « politiquement asservi », obstacle majeur du progrès, et tasse de thé des politiques de peu !

Transposons par pur exercice neuronal le mode de sélection des dirigeants d’entreprise à notre institution. Voilà une structure organisée dont l’objectif est de produire des services, qui dispose d’un budget et de personnels qui y concourent. L’organisation s’appuie sur une cellule en charge de trouver le meilleur président pour conduire le navire à bon port, au milieu des récifs et tempêtes quotidiennes. Sa mission est de révéler les traits essentiels des candidats, pouvant laisser entendre qu’ils réagiraient de telle façon dans telles circonstances. Bref, qu’ils seraient proches du « plus haut plafond des compétences » pour bien faire en cas de coup dur. Pas facile. Comment imaginer qu’un homme normal ne soit pas perturbé dès qu’il entre dans une bulle où tout est organisé à son insu, planifié, éthéré ? On attend de l’homme d’État « une faculté supérieure à la faculté de résistance de tous les autres. Il faut qu’il manifeste, à lui seul, plus d’énergie que la terre tout entière », dit encore notre référent2. Qu’il transcende le temps, aguerri contre les lobbies et l’évanescence du fait divers. Il est des moments où la décision change la face du monde. Notre armée s’efface du champ de bataille de 40 en une semaine, avons-nous dit. La Révolution de 89 se joue en vingt-quatre heures, lors de la prise de la Bastille. Des chefs d’État à la hauteur auraient pu inverser le cours de l’Histoire. Mais les phraseurs nocifs d’alors monopolisent la scène et étouffent les faiseurs de salut ! Souvenons-nous des premiers temps de notre ère, où Rome est à son apogée. Ses dirigeants sont portés au pouvoir suivant leurs qualités. Puis une dérive s’installe, où le droit du sang prime la compétence. Et le déclin s’annonce…

Que l’homme au pouvoir sache aussi s’entourer. Cependant, Gustave Le Bon3, l’un des penseurs en communication les plus éminents auquel se référait le Grand homme, mettait en garde les êtres « trop » supérieurs qui risquaient de n’avoir aucune influence sur le peuple. Un écart manifeste de compréhension entre les deux peut faire qu’ils se rejettent. Aucun risque aujourd’hui ! Que les ministres soient proches des réalités du quotidien !

    Leur compétence est bornée par celle du président, d’où l’extrême nécessité de retenir un profil du plus haut niveau. Logique, pour ne pas susciter d’ombrage. Sully, Richelieu, Mazarin,

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  1. Voir L’inquiétude outre-mort du général de Gaulle, d’Anne et Pierre Rouanet, Grasset, 1985.
  2. Voir En écoutant de Gaulle, op. cit.
  3. Dans Psychologie des foules, PUF, 1981

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Colbert, vous n’étiez pas des êtres suprêmes, mais vous avez fait de la France le phare du monde ! Sous le règne d’esprits supérieurs ouverts à vos initiatives et conseils, humbles devant vos compétences.

L’entreprise sait comment rechercher les meilleurs, en comparant les performances (benchmarking, comme on dit Outre-Manche). C’est son pain quotidien. Et ça marche. Inspirons-nous de ses capacités. Mais les professionnels en charge de la tâche ne veulent pas. Ils disent que ce n’est pas la même chose. Que les politiques ne sont pas des dirigeants d’entreprise… et tout à l’avenant ! Quand on entend ça, on hallucine ! Il faut à la tête du pays des gens qui connaissent le terrain comme vous et moi. Cinquante pour cent de ministres ingénieurs ou ayant dirigé des entreprises. Sinon c’est la cata, comme aujourd’hui. Bientôt, de notre « pays-Méduse », il ne restera plus que le radeau. Donc, inscrire dans le programme de la présidentielle à venir la parité « terriens-blablateurs », y compris au plus haut niveau de l’État. Comme en Chine, où l’élite au pouvoir, comme on dit, est formée pour moitié de scientifiques. Un seul bac, où l’on enseigne la rège de 3, comme on l’apprenait à l’école. Maintenant, il parait que les zénarques ne savent pas faire. Pas étonnant, la seule matière commune à tous les prochains bacs sera la… philosophie ! Nous voilà sauvés !

Sinon, gare ! Anecdote croustillante, les conseillers d’entreprise ne veulent pas s’occuper de tels « recrutements », pour ne pas se faire taper sur les doigts par des partis mécontents, et donc perdre des marchés… de conseillers ! Parfait exemple de la veulerie dans laquelle baigne le monde dont il s’agit. On pourrait aussi (mieux, on devrait) faire comme les entraineurs sportifs. Étudier au plus près comment se comportent nos dirigeants devant leurs confrères étrangers. Enregistrer et interpréter leur pression artérielle, leur rythme cardiaque, leur élévation de température, éléments qui en disent long sur leurs capacités à bien réagir en milieu difficile. Et noter ceux qui marquent des points dans la joute internationale. Bientôt, on identifiera les gènes de la performance managériale. On travaille sur ses critères fondamentaux. Au final, on évalue qui convainc, et qui subit. Et on élimine les mauvais.

Prenons de la distance, et voyons l’affaire avec sagesse. Parmi les attributs demandés aux élus, une qualité suprême s’impose, justifiée par des siècles d’observation : l’exemplarité. Sans elle, les plus grandes compétences font long feu. Elle est le catalyseur de la bonne gouvernance. Sur cet aspect, la lucidité populaire est surprenante. Plutarque, penseur grec de la Rome antique il y a deux mille ans, avance : « La foule perce à jour même ce qui semble enfoui très profondément chez les hommes politiques, leurs caractères, leurs intentions, leurs actions et leurs vies, et ce n’est pas moins pour ses habitudes privées que publiques qu’elle aimera et admirera l’un, comme elle repoussera et dédaignera l’autre1. » Prêcher par l’exemple est la vertu des dieux. Cette modestie coutumière est capitale.

Sénèque2, notre philosophe préféré, confirme : « Pas un geste, pas un mot de l’homme d’État, pas un déplacement qu’il puisse faire incognito ; il est visible en tous lieux et à tout instant, et c’est là une servitude infinie ». Il est rivé à son sommet, ajoute Baudelaire. Nous sommes là à mille lieux du comportement des tout-venant actuels !

Point fondamental. Point préoccupant ! L’attitude du président se transpose dans la vie de chacun d’entre nous. La neuroéthique enseigne que le comportement d’autrui modifie le génome de celui qui observe. À chaque instant, inconsciemment, nous façonnons les générations en devenir. Les bons présidents répondent à l’engagement de Rousseau : « Proposons de grands exemples à imiter, plutôt que de vains systèmes à suivre3. » A-t-on beaucoup entendu des postulants au Château, comédiens des ridicules « primaires » (procédure de bas étage par rapport à celle proposée ici), faire valoir leurs réussites professionnelles à tel endroit et en proposer une application généralisée en cas de succès ?

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  1. Dans Psychologie des foules, PUF, 1981
  2. Voir De la Clémence.
  3. Dans Julie ou la Nouvelle Héloïse.

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Plutôt que cela, nous apprenons de la bouche d’un Président que les Français sont des Gaulois réfractaires au changement, qu’ils ne sont rien, illettrés, sans culture, fainéants, colonisateurs, et tout et tout, le « paquet » de la faute de notre République, allons donc ! et qui se plaisent dans le désordre… Est-ce bien ce qu’il faut dire pour nous entraîner vers les succès de demain ? Imaginons que, contrairement au précédent, il soit fait appel à nos mille capacités à innover, à nos vertus du bien faire, à notre intelligence, sans doute insuffisamment apparentes. Nous évacuons les contraintes psychologiques qui entourent ce délicat sujet, et permettons à des voix nouvelles, lucides et claires, de nous proposer des solutions salutaires.

On s’interroge sur la façon de décider, à mille lieues des chicaneries de bas étage que l’on observe dans le monde gouvernemental. Des formes plus appropriées à l’esprit humain doivent aujourd’hui prévaloir. Ainsi, la procédure en vigueur au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) conduit au choix qui émerge des échanges. Un seul objectif : être le plus conforme à l’intérêt général. La raison prévaut sur le nombre. Revenir aussi aux sources de la démocratie athénienne. Une gouvernance « tournante ». Par tirage au sort tous les deux ou trois ans, une nouvelle équipe accède au pouvoir. On a constaté sur certains exemples, en d’autres domaines, que ça marchait !

Une autre idée pourrait être retenue, dans l’esprit du Conseil des sages du Global Elders (créé par Nelson Mandela, qui réunit mille ans d’expérience collective). Il valide les candidats qui semblent convenir. Aucun engagement n’est pris. L’aide consiste à montrer aux électeurs ce que les candidats ont fait dans leur passé. En plus et en moins. Les citoyens deviennent responsables de leur futur. Choisissent parmi les postulants. Et en assument les conséquences.

On pourrait faire appel à l’intelligence dite artificielle (IA), nouvelle poule aux œufs d’or dont il semble que le machin soit capable de résoudre tous les problèmes du monde. Donc, pourquoi pas le premier, c’est-à-dire nous éclairer sur le candidat le plus apte à bien diriger le pays ?

L’IA, dit-on, permettrait de prendre en compte davantage de critères que la méthode classique. C’est quand même toujours là le point faible. Et si on « oubliait » justement les ingrédients les plus importants ? Ceux qui font la différence en fin de course ? Mais on gagnerait par un travail moins obscur que d’ordinaire parce que plus technique et transparent, et on irait plus vite au but. Il nous faut aujourd’hui quitter les archaïsmes de la gouvernance dépassée des nations, qui manifestement est d’un autre âge. Sans avoir la naïveté de croire que la quête du Graal soit sans embûches, il nous faut oser en la matière. On n’en peut plus de la médiocrité qui nous entoure. Bien sûr, il faut savoir évaluer à priori où nous entraineraient les décisions prises. Mais on le fait bien dans le privé. Un dirigeant échoue ? Oust, dehors ! Mais surtout on cherche à comprendre ce qui n’a pas marché. Pour ne plus recommencer.

J’aime bien une émission à la TV qui s’appelle Air Crash. Un avion s’écrase. Bien dans la peau des pilotes et des experts, on veut à tout prix comprendre ce qui s’est passé. Défaut matériel ? Erreur des hommes aux commandes ? On reconstitue l’appareil à partir du puzzle des débris épars. On épluche le passé des pilotes. Les contrôles qui ont précédé. Les risques militaires et autres des zones survolées. On cherche. Et on trouve, généralement. Et surtout, on corrige ce qui a fait défaut. Et toujours, on rend les pilotes encore plus capables. Pourquoi donc, devant tant de bon sens, ne ferait-on pas de même avec nos politiques ? Si on fait aussi bien pour un avion, pourquoi ne le fait-on pas pour sauver une nation ?

Bien sûr, comme chaque fois que l’on imagine autrement que le penser correct du moment, les gens de peu commencent par dire que ce n’est pas possible. Ils nous inondent d’un déluge d’inepties en tout genre. Bien au contraire, il faut tendre l’oreille vers ceux qui dérangent. Pas qu’ils aient toujours raison, mais ils ont au moins le courage de ruer dans les brancards. Et c’est déjà glorieux ! Un exemple. Joseph, le fils ainé des Kennedy, doit présider les États-Unis. C’est du moins ce que son père veut pour lui, la guerre terminée. En 1945, pour son dernier vol, il se prépare à bombarder l’ennemi. Cependant, un sous-ordre l’avertit qu’un défaut électrique menace de faire exploser l’avion, et qu’il faut le réparer. On rabroue l’énervé. Les « hauts » gradés rejettent l’avis de l’arrogant. Sans diplôme, il a tort. Joseph embarque dans l’appareil qui se crashe comme prévu. Sans les idiots d’alors, notre monde serait peut-être meilleur ! Aussi, en 1986, la navette spatiale américaine Challenger se désintègre en vol avec sept astronautes, en raison de joints affaiblis par le froid. Les ingénieurs avaient averti du danger du lancement par un jour glacial. Les dirigeants du programme spatial passent outre. À l’inverse, Pasteur, contre leur avis et abandonné de tous les siens, prend le risque inouï de vacciner le jeune Meister contre la rage. Peut-être, sans lui, ne serions-nous pas ici aujourd’hui… Suivant le dicton bien connu, avant de résoudre un problème, ces gens de l’opposition destructrice sont le premier à résoudre. Ignorons-les !

Sinon, voyant l’horizon qui s’obscurcit chaque jour par l’effondrement des digues qui soutiennent une paix de plus en plus précaire (anarchie généralisée en différents points du monde ; immigrations non contrôlées ; surnatalité, et plus), nous en serons réduits à nous interroger, comme Pasteur cette fois en 1871 : « Pourquoi la France n’a-t-elle pas trouvé d’hommes supérieurs au moment du péril1 ? « Ou bien, encore plus paradoxal, le chef du Reich qui découvre Paris le 16 juin 1940, et s’exclame : « Pourquoi personne ne s’est-il battu pour défendre de telles merveilles ? » Suivi par Staline qui éructe sur ces pleutres qui ont vite fait de baisser la culotte. Il est vrai que l’on préfère vaquer à l’infini à la recherche stérile d’une meilleure forme utopique de gouvernement. C’est moins difficile, et sans grand risque.

À défaut, chacun d’entre nous, par une compétence et une lucidité accrue qui s’alimentent du savoir généreusement répandu, choisira la démocratie directe sur la Toile ou les ronds-points pour faire prévaloir ses choix. Et l’on sait que le pouvoir du nombre supplante tous les autres. Sans révolutionner le monde, la votation, solution sympathique de nos amis suisses, permet de les consulter sur de multiples aspects de société, importants ou moins. Ainsi, faut-il délivrer gratuitement les soins médicaux ? Empêcher les animaux de souffrir ? Supprimer les décorations ? Mieux maitriser les entrants dans le pays ? Imposer les loyers « loyaux » ? Elle conforte l’aimable attention portée au « citoyen responsable ». Elle lui donne la parole sur les aspects les plus immédiats de sa vie quotidienne. Belle alternative à la grévitude stérile qui désorganise notre quotidien de citoyen ignoré. N’est-ce-pas justement ce que voulaient en premier lieu les Gilets jaunes ? Et savez-vous ce qu’il est advenu ? Le plus navrant, dans tout cela, est que la chose est parfaitement transposable chez nous. La Suisse a muri l’affaire pendant longtemps. Elle en a fait le fondement de sa bonne gouvernance politique. Quand commencerons-nous ? Un peu de courage, et demain, comme Vauban, nous aimerons notre patrie jusqu’à la folie ! Et savez-vous ce qu’il adviendrait ? Eh bien, une augmentation immédiate de deux points de notre richesse nationale, par l’énergie retrouvée de nos compatriotes à retrousser les manches !

À moins que ? À moins que, comme on l’entendait l’autre jour sur une radio catho, la solution, dépassant l’entendement humain, serait de prier pour qu’un dirigeant bien, un souverain bien comme disait les Anciens, nous vienne un jour… Mais là, ça n’engage que ceux qui y croient !

République exemplaire ? ou, mieux, France exemplaire ! On adopte ?

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  1. Voir Pasteur, Pierre Darmon, Fayard, 1995.

Collectif « Préconisations citoyennes »

Collectif « Préconisations citoyennes »

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République exemplaire, l’Institut de formation-recherche-action contre les violences (Ifrav) et Justice et Démocratie se rassemblent au sein du Collectif « Préconisations citoyennes ».

Les initiatives qui suivent s’inscrivent dans les consultations en cours sur les attentes populaires en matière de représentation élective.

1 – République exemplaire*

1-1 Un Président compétent1

Constat

Le Président représente la nation. Il assume, pour le bien commun, la plus haute fonction de l’État. Il doit être remarqué par des qualités à la hauteur des responsabilités que les citoyens lui confient. Une saine répétition des valeurs premières de nos compatriotes. Un élan reconnu vers une aspiration partagée à faire plus et mieux, ensemble ! En permanence sous les yeux citoyens, il exerce un ascendant sur son auditoire qui se retrouve, ou non en lui. Le mouvement des Gilets jaunes reflète le désarroi de nos compatriotes à cet égard.

On touche là un paradoxe peu (sinon jamais) étudié. L’élection présidentielle semble être le seul exemple où l’on confie les plus importantes décisions à un candidat qui n’a pas été évalué sur ses compétences. Alors qu’il faut de nombreuses années, après des études difficiles, pour nous soigner, construire un pont, enseigner, et, plus encore, devenir astronaute. Un chef d’État qui peut engager une guerre, prendre des décisions bonnes ou mauvaises sur tous les aspects de notre vie, arrive au pouvoir suivant des critères à mille lieues du savoir : 90 % pour le paraître (50 % pour la gestuelle et 40 % pour l’intonation) ; 10 % pour le contenu.

Accepterions-nous d’être soignés par des médecins professionnalisés sur de telles bases ? Et pourtant, nous remettons aux politiques un pouvoir beaucoup oh combien plus vaste !

Avant toutes choses, il faut remettre en cause la procédure de qualification du chef de l’État. Les partis politiques poursuivent leur propre intérêt, avant celui de la nation. Le général de Gaulle avait des idées claires sur le sujet. Il imaginait ouvrir une formation pour de futurs chefs d’État à des personnages hors partis (il aurait volontiers fondé une Société d’encouragement pour le développement de la « race » présidentielle…).

Mettre en œuvre une telle procédure de sélection du Président est la clef de voute de toute gouvernance étatique. Les projets de réformer les institutions ou autres organisations connexes pour espérer une meilleure direction sont illusoires. Tout régime mal dirigé conduit aux désordres, quel que soit son statut !

Solution

Bien évidemment, dès la prise en compte d’un tel sujet, on imagine la nuée des opposants a priori pour lesquels toute idée iconoclaste relève d’esprits dérangés, même si elle peut être porteuse des plus grands bénéfices pour l’humanité. Mais que la sagesse ouvre le chemin !

Ainsi, la conception et la mise en œuvre du projet doivent réunir des experts en affaires politiques. L’entreprise privée, pour laquelle la qualité des personnels est essentielle, est riche de savoir faire en la matière. Les plus grands « chasseurs de tête mondiaux » ont confirmé leur capacité à ouvrir le chemin. À l’international, des exemples sont prometteurs. Ainsi Le Comité des sages de Nelson Mandela, apte à réunir les plus grandes compétences pour intervenir sur les points critiques de la planète. Un tel aréopage valide le passé des postulants.

L’étude commence par identifier les procédures proches du sujet, partout au monde. En retire la substance la plus riche, puis lui apporte sa valeur ajoutée. Les candidats s’engagent à assumer la fonction en respectant des impératifs de base, suivant une charte nourrie de leur propre expérience et de leur capacité à se projeter dans l’avenir, contrôlée et signée. Des élus compétents, non assujettis à des pouvoirs exogènes, (dits « politiques-bio », ou Polibios !) s’annoncent à l’horizon… Le reste suivra.

1-2 Des députés qui remplissent leurs fonctions2

Constat

Royer-Collard, présidant l’Assemblée nationale il y a un siècle, affirmait : « Il faut une chambre élective afin que la société tout entière et les vicissitudes qui s’opèrent en elle retentit sans cesse au sein du gouvernement, et qu’ainsi il soit forcé à la vigilance, à la prudence, à la prévoyance, qu’il fasse un avec la nation et ne vieillisse point avec elle. »

Les parlementaires sont élus pour représenter au plus près nos compatriotes. Le débat actuel signe leur incapacité à ressentir nos besoins.

Solution

Concevoir une procédure de sélection représentative, dans le même esprit que celle appliquée à la sélection présidentielle…

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* Président Michel Le Net – michel-le.net@republique-exemplaire.eu – 01 46 66 24 65

1 –  Ce sujet est plus abondamment traité dans notre Ça pique ! Secouons nos neurones… (Éditeur Jean Picollec), chapitres V-2 : « Président, comment choisir le meilleur ? » ; V-7 : « Exemplaire ? Est-ce-que nous pouvons espérer avoir un jour un Président exemplaire ? » ; V-9 : « Quel est votre π ? » ; V-10 : « Se projeter sur trente ans. Pour une charte de la décision »

2  –  De même, voir dans l’ouvrage ci-dessus, le chapitre V-8 : « Funeste destin du « tout-venant » politique ».

 2 – Justice et Démocratie*

2 – 1 Un Référendum d’initiative citoyenne

Constat

Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la France est la cible d’une nouvelle forme de guerre de conquête. Les armes utilisées bouleversent les fondements de la démocratie et de l’état de droit. Il s’agit d’un pillage et d’une prédation appuyée par la finance, dont très souvent la dimension criminelle est avérée. Les citoyens en ont de plus en plus conscience. Le pouvoir de décider doit revenir aux citoyens, et la France doit retrouver sa souveraineté.

Solution

« Transporter le raisonnement de l’individuel au collectif, de l’homme au peuple »

Chateaubriand  (Génie du christianisme)

Promouvoir la démocratie directe, c’est-à-dire le référendum d’initiative citoyenne.

Projet de RIC : Êtes-vous favorable à la création d’un Référendum d’initiative citoyenne ?

2-2 Une justice indépendante

Constat

La seule raison d’être de l’État est d’assurer la sécurité des citoyens et la protection de leurs biens. C’est pourquoi la justice rendue au nom du peuple français ne doit être soumise à aucune influence idéologique, ni subir la moindre menace qui ne soit pas sanctionnée.

Le référendum d’initiative citoyenne doit permettre de garantir l’indépendance et l’impartialité des juges, puisque chaque décision permet d’apprécier la juste qualification des actes et des faits ainsi que la qualité du raisonnement qui conduit au jugement qui est rendu.

La crise actuelle est institutionnelle puisque la revendication principale des citoyens est cette égalité devant la loi, sans laquelle il n’existe pas de démocratie. Situation elle-même aggravée par la disparition de la souveraineté de la France au profit d’intérêts financiers, notamment étrangers, qui sont à l’origine de l’insécurité, du chômage et, par conséquent, d’une perte totale de confiance dans les représentants de la classe politique.

Solution

Tendre vers une justice indépendante dont le statut la met à l’abri de toutes pressions indues, ce qui suppose qu’elle repose sur un pouvoir légitime et responsable, bénéficiant de l’appui de la défense nationale et de tous les services de l’État en charge de la défense des intérêts fondamentaux de la nation.

Projet de RIC : Êtes-vous favorable à une justice indépendante de toutes pressions extérieures ?

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* Président Maître Roland Sanviti – roland.sanviti@orange.fr – 01 45 24 70 07

3 – Institut de formation-recherche-action contre les violences – La citoyenneté contre la violence (Ifrav)*

Un Tribunal pénal international sur la Finance

Constat

Les meurtriers en col blanc doivent être jugés pour leurs crimes comme tout autre criminel. Certains de leurs crimes sont des crimes contre l’humanité. Ceux qui s’amuseront à ce jeu de fausse monnaie et de fausses promesses et, surtout, à la spéculation sur les matières premières vitales sauront ce qui les attend : une condamnation, la confiscation de leurs avoirs et la prison.

Solution

Nous proposons la création d’un Tribunal pénal international sur la Finance (TPIF) ayant compétence universelle pour juger les crimes financiers. Nous proposons que ce Tribunal siège à Genève, État neutre non concerné par la crise financière, mais qui la subit de plein fouet, l’État suisse pouvant être mis en faillite par les produits toxiques vendus à ses banques.

La Suisse peut être le centre du nouveau monde multipolaire, car c’est un pays qui, depuis sa constitution au 15e siècle, a su résister à tous les totalitarismes et qui a su préserver son unité et sa diversité dans la fédération, un modèle pour l’Europe, mais aussi un modèle pour l’organisation mondiale, qui sortirait ainsi de l’orbite anglo-saxonne.

Projet de RIC : Êtes-vous favorable à la création d’un Tribunal international sur la finance ?

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* Président Maître Laurent Hincker – info@hincker-associes.com – (01 43 36 45 02)

Aux Jeunes Gens

Quelques conseils de bien vivre

 Michel Le Net

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Nous avons conscience du caractère parfaitement iconoclaste du titre de ce texte. Est-il encore aujourd’hui des Jeunes Gens, tels ceux auxquels les professeurs de saine conscience  s’adressent il y a un siècle pour leur enseigner quelques préceptes de cette Morale pratique qui leur permettraient de conduire leur vie comme il convient ? Termes désuets, rejetés par ceux-là mêmes qui s’affichent adultes avant que d’avoir été jeunes. Et pour lesquels avancer des principes de vie saine, validés par cinq mille ans d’expérience par leurs « anciens », ne valent aujourd’hui guère plus que roupie de sansonnet.

Il n’empêche. La vertu comme la nature ayant horreur du vide, du moins pouvons-nous plus ou moins naïvement le penser, ouvrons-nous à cette initiative de lucidité. Comme en ces années qui précèdent la Première Guerre mondiale, où le désarroi moral est tel que nul ne songe à le contester, proposons-nous d’ouvrir à la conscience et à la raison de nos enfants certaines vérités de grands bon sens…

La vie ne s’apprend pas à l’école ou par quelques principes abstraits. Elle s’apprend par l’action et la vie même. Laissons aux politiques de rien et aux philosophes de peu ce brouillamini des mots dont il ne sort rien d’utile. On lance des idées sensées transformer le monde, alors qu’on a peine à gérer le quotidien. Ainsi la liberté, exemple de ces termes emblématiques affichés au fronton de nos établissements publics et sensés glorifier nos vertus universelles. Mais est-il plus difficile qualité à pratiquer que celle-là ? Hier encore, protégés dans leur cocon de l’enfance, nos enfants découvrent brutalement la dure réalité de la vie. Les droits omniprésents qui s’attachent à leur statut de dépendance familiale font place à des devoirs auxquels ils sont peu préparés. Lourd fardeau, qui oblige à des efforts auxquels chacun va devoir se soumettre. Cela d’autant plus depuis l’effacement de cette école du civisme égalitaire qu’était le service militaire pour tous. On y apprenait les vertus premières qui, dans le prolongement de cette initiation au combat, servent dans toutes les circonstances de la vie : l’habitude de l’effort ; le courage ; la patience ; l’égalité ; la solidarité devant l’obstacle ; aussi l’amour du sol qui nous a reçus, la mémoire et le respect dû à nos pères. Nous ressentions l’âme de la nation, quelle que soit l’interprétation que chacun peut lui donner. Mais on s’entend, héritiers de son passé parfois tourmenté, elle est nôtre et sacrée. L’aimant comme une mère, nous devons la servir, pour que demain elle soit encore plus vénérable. Notre devoir citoyen est omniprésent. La loi est le fondement de toute civilisation qui perdure. Son respect est le point commun à la survie des espèces vivantes, de toutes natures. En aucun moment, à aucun endroit, l’état social d’un État est le meilleur. Il doit évoluer suivant l’aspiration permanente à faire toujours mieux. Mais bien sûr, dans le respect de la loi présente.

Une réflexion pratique sur notre vie intérieure est un autre aspect de l’éducation passée qui gagnerait à revivre. Les druides nous ont précédés au-delà de la mémoire, supérieurs en nous en de multiples domaines. Ils situaient la tolérance au panthéon des vertus. Ainsi en est-il du sentiment religieux, qui relève de dogmes divers et d’applications spécifiques. Notre devoir à cet égard, confirmé par des millénaires d’expériences et la quasi-unanimité des penseurs de bon sens, nous porte à ne pas blesser un homme dans sa foi, souvent la valeur la plus profonde qu’il porte en lui-même et qui peut le conduire jusqu’au sacrifice suprême. Pour les adeptes à ces interprétations de l’au-delà, le monde sans l’idée d’un Dieu n’est qu’un désert stérile, où la seule raison au sein de laquelle toute chaleur humaine est absente est un non-sens. Ainsi, lors d’un dîner chez Voltaire, la marquise du Châtelet s’étonne que les parlementaires britanniques tolèrent une si grande absurdité que la religion chrétienne. Elle s’entend répondre par le comte de Chesterfield qu’ils n’ont rien trouvé de mieux à y substituer… La croyance devient un guide de vie, au besoin jusqu’à celui du sacrifice. Turenne, illustre maréchal des rois de France au XVIIe siècle, constatait que le courage de ses soldats était amplifié par leur engagement religieux. Plus proche de nous, combien d’Hommes d’État n’ont-ils pas appelé leurs troupes au combat pour la victoire de leur « sainte » patrie ! Bien sûr, et nous nous comprenons, cette liberté individuelle s’accorde avec la neutralité de l’État vis-à-vis de ces engagements. La loi du nombre n’éteint pas la foi personnelle, elle la limite dans ses empiètements éventuels dans l’ordre régalien.

Personne n’échappe aux éternelles questions existentielles qui se posent à lui un jour ou l’autre : d’où viens-je ? où vais-je ?… Une vie exemplaire n’oblige pas à s’interroger à l’infini sur les réponses à leur apporter. Cependant une quête intérieure généreusement engagée est recommandée pour s’y approcher, comme le recommandait Socrate pour qui la vérité absolue est en nous-mêmes, et ne demande qu’à être révélée. Faire effort chaque jour pour repousser l’ignorance permet d’approcher du Graal, symbole de la plénitude de la connaissance. Alors la pensée s’élève au-dessus du médiocre, quitte cette philosophie d’antichambre comme l’appelaient nos anciens professeurs d’éthique, pour approcher ce culte désintéressé, mais oh combien enrichissant, des valeurs supérieures. Il reste à s’interroger sur les aspects louables de notre conception d’une vie saine. Notre existence, celle du règne vivant, est commandée par la solidarité qui doit nous unir. Sans elle, nous disparaissons. Vœu pieu, pouvons-nous penser à la lecture du quotidien qui nous abreuve du contraire. Guerres, massacres et autres turpitudes engendrés par la mauvaiseté qui nous imprègne ont le champ libre si on laisse la bride sur le cou à notre naturel délétère. Agir, maître mot ! Combien de nos seniors en pleine force de l’âge baissent les bras alors qu’ils sont encore pleinement productifs, porteurs de cette sagesse rare qu’a façonnée une vie de labeur. Peut-être leur manque-t-il ce tire-sève qui appelle à l’action en permanence. Mais n’est-ce pas là une certaine forme de devoir pour ceux à qui la déesse Hygie a accordé le privilège de la santé…

Pour refuser l’erreur ou la médiocrité, il faut mettre toute idée nouvelle à l’épreuve du doute. Ne pas être esclave des habitudes et des préjugés. S’ouvrir à la créativité dont l’absence est un mal qui tue surement. « La mort n’est qu’une défaillance de la volonté de vivre ! » avance Goethe, qui applique principalement sa sentence aux peuples fatigués. En bref, conseille le sage aux jeunes gens qui veulent s’inscrire dans la trace de ceux qui ont fait le bien, seules les hautes idées façonnent les volontés. Traversez virilement l’existence, avec ce plus de gaité et d’ailé qui signe l’éternelle jeunesse. Un brin d’éblouissement devant le beau et le vrai qui n’attendent que d’être reconnus comme tels. On appelle cela le feu sacré. Car rester jeune, écrit un philosophe du siècle dernier : « c’est avoir le sérieux vivifié par l’enthousiasme, la gravité embellie par la poésie, la solidité du caractère embaumée par la fraicheur des sentiments ; c’est garder la croyance au bien avec la volonté du mieux, c’est mettre toute son énergie d’homme au service du rêve de Beauté et d’Amour qui manque rarement d’éclore dans une âme de vingt ans. »

Intelligence artificielle, hybridation et justice populaire

Roland Sanviti

Avocat à la Cour

Justice & Démocratie

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Chacun s’accorde pour admettre que l’intelligence artificielle ne peut procéder que des informations que l’homme aura communiquées à la machine et que les algorithmes, purs produits de ses facultés intellectuelles, auront mis en musique.

Puisqu’il faut appeler un chat, un chat, et que l’artifice procède de la tromperie et s’oppose au naturel, force est d’admettre que l’intelligence artificielle n’est et ne sera pas l’intelligence.

Or la justice est la forme la plus accomplie de l’intelligence puisqu’elle procède, non seulement de l’esprit d’analyse et de synthèse, mais également du courage et de l’émotion, c’est-à-dire qu’elle ne peut émaner et s’adresser qu’à des êtres de chair et de sang qui seront eux-mêmes juges avant que d’être jugés.

C’est pourquoi la justice prédictive constitue le simple aveu que la justice susceptible d’être ainsi rendue sera dépourvue de toute intelligence.

À ceux qui s’interrogent sur la légitimité du juge, voire sa responsabilité, il suffit de les inviter à se pencher sur la motivation d’un jugement, puisque c’est en fonction de la qualité de cette motivation que se manifeste l’intelligence, c’est-à-dire l’expression de la compréhension intuitive et rationnelle des actes et des faits qui peuvent être soumis au peuple tout entier, puisque la justice est rendue en son nom.

Aussi, l’ultime recours contre une justice injuste n’est pas le juge, mais le peuple puisque la démocratie vers laquelle il faut tendre lui impose ce lourd fardeaux, assumer la responsabilité de ses choix.

Depuis la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 24 juin 1793 et sa consécration au travers de l’avènement d’un état de droit, la juste qualification des actes et des faits et leur juste sanction auraient permis de limiter le sacrifice d’êtres humains sur l’hôtel de la perfidie.

Que cette perfidie puisse s’exprimer aujourd’hui au travers d’une prétendue justice, notamment prédictive, nous invite à faire appel à l’histoire puisque la barbarie et la violence exercées le plus souvent au détriment des peuples une fois parvenue à leur fins ont su se travestir sous les atours de la légitimé.

C’est pourquoi, une étude remarquable a été consacrée par Jean-François Gayraud « La théorie des hybrides » dont Xavier Raufer s’est fait l’écho à plusieurs reprises dans ses notes d’alerte.

L’hybridation est inscrite dans l’histoire et dans la vie de tous les jours, ce qui a toujours rendu difficile à distinguer le bon grain de l’ivraie, et seule la justice, qui est le bras armé du peuple, est en mesure de pourfendre cette imposture.

Laissons à la règle à calcul et aux ordinateurs leur seule et véritable destination, celle d’être l’outil du progrès scientifique et technique au service de l’Homme et non pas pour le transformer en robot, nouvel esclave des temps modernes, et pur produit de cette autre forme d’hybridation.

Le dévoiement des mathématiques dans le domaine de la finance et les conséquences qui en résultent, doivent suffire à démontrer que la perfection de justice ne peut procéder que de l’institution elle-même et des Hommes libres et responsables qui sont à son service.

« L’intelligence, c’est la faculté de reconnaître

 le Vrai, le Beau, le Bien ».

Emmanuel Kant

Intelligence artificielle, hybridation et justice prédictive

Roland Sanviti

Avocat à la Cour

Justice & Démocratie

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Chacun s’accorde pour admettre que l’intelligence artificielle ne peut procéder que des informations que l’homme aura communiquées à la machine et que les algorithmes, purs produits de ses facultés intellectuelles, auront mis en musique.

Puisqu’il faut appeler un chat, un chat, et que l’artifice procède de la tromperie et s’oppose au naturel, force est d’admettre que l’intelligence artificielle n’est et ne sera pas l’intelligence. Or la justice est la forme la plus accomplie de l’intelligence puisqu’elle procède, non seulement de l’esprit d’analyse et de synthèse, mais également du courage et de l’émotion, c’est-à-dire qu’elle ne peut émaner et s’adresser qu’à des êtres de chair et de sang qui seront eux-mêmes juges avant que d’être jugés. C’est pourquoi la justice prédictive constitue le simple aveu que la justice susceptible d’être ainsi rendue sera dépourvue de toute intelligence.

À ceux qui s’interrogent sur la légitimité du juge, voire sa responsabilité, il suffit de les inviter à se pencher sur la motivation d’un jugement, puisque c’est en fonction de la qualité de cette motivation que se manifeste l’intelligence, c’est-à-dire l’expression de la compréhension intuitive et rationnelle des actes et des faits qui peuvent être soumis au peuple tout entier, puisque la justice est rendue en son nom. Aussi, l’ultime recours contre une justice injuste n’est pas le juge, mais le peuple puisque la démocratie vers laquelle il faut tendre lui impose ce lourd fardeaux, assumer la responsabilité de ses choix.

Depuis la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 24 juin 1793 et sa consécration au travers de l’avènement d’un état de droit, la juste qualification des actes et des faits et leur juste sanction auraient permis de limiter le sacrifice d’êtres humains sur l’hôtel de la perfidie. Que cette perfidie puisse s’exprimer aujourd’hui au travers d’une prétendue justice, notamment prédictive, nous invite à faire appel à l’histoire puisque la barbarie et la violence exercées le plus souvent au détriment des peuples une fois parvenue à leur fins ont su se travestir sous les atours de la légitimé. C’est pourquoi, une étude remarquable a été consacrée par Jean-François Gayraud « La théorie des hybrides », dont Xavier Raufer s’est fait l’écho à plusieurs reprises dans ses notes d’alerte.

L’hybridation est inscrite dans l’histoire et dans la vie de tous les jours, ce qui a toujours rendu difficile à distinguer le bon grain de l’ivraie, et seule la justice, qui est le bras armé du peuple, est en mesure de pourfendre cette imposture. Laissons à la règle à calcul et aux ordinateurs leur seule et véritable destination, celle d’être l’outil du progrès scientifique et technique au service de l’Homme et non pas pour le transformer en robot, nouvel esclave des temps modernes, et pur produit de cette autre forme d’hybridation.

Le dévoiement des mathématiques dans le domaine de la finance et les conséquences qui en résultent, doivent suffire à démontrer que la perfection de justice ne peut procéder que de l’institution elle-même et des Hommes libres et responsables qui sont à son service.

« L’intelligence, c’est la faculté de reconnaître

 le Vrai, le Beau, le Bien ».

Emmanuel Kant

La langue française, ou l’engagement populaire à préserver notre patrimoine culurel

L’article qui suit exprime la position de Michel Le Net et d’Albert Salon, qui ont commandé ce sondage au titre  de République exemplaire (RE) et d’Avenir de la langue française (ALF)¹, Il prolonge leur communiqué précédent « Contre les prédateurs de la langue française, que le peuple de France oppose la pérennité de ses valeurs », diffusé le 2 septembre 2017 et qui annonçait cette enquête2.

Ce sondage est inédit par son originalité. Il analyse  une composante majeure de notre société, commandée par deux organismes de droit privé. Une action conjointe sollicitée auprès des autorités publiques est restée sans réponse, alors que l’on imagine qu’un tel travail relève en premier de leur autorité. Faillite de l’État, ou ignorance délibérée d’une aspiration populaire à sauver, ou du moins à préserver cet élément majeur de notre capital culturel ?

Sans connaître l’« état des lieux », comme on dit, on ne peut guère définir et mettre en œuvre une politique de bon aloi. Tel est l’objet de la présente enquête qui révèle des enseignements du plus grand intérêt. Préalable, sans lequel rien n’est possible : pour 9 Français sur 10, notre langue est une composante majeure de l’identité française.

Conscients des atteintes répétées contre notre langue (faiblesse de son enseignement ; galvaudage par les médias ; laisser aller des politiques ; etc.), nos compatriotes, pour plus de la moitié, sont prêts à s’engager dans une action volontaire pour en assurer la bonne santé. Exerçant une forme de lanceurs d’alerte, ils s’engagent à révéler publiquement les dérives majeures qui pourraient être effacées au moindre effort. Un organisme accrédité centraliserait les suggestions reçues, et interviendrait auprès de qui de droit pour corriger les déviances les plus criantes, et leur substituer des solutions alternatives. Des références tangibles existent. La Licra, la Spa, qui veillent aux valeurs qu’elles défendent (communautarisme pour le premier, souffrance des animaux pour la seconde) font ainsi. Prenons le terme hashtag, agressif  dans son écriture comme dans sa phonétique, parfait exemple de l’intrusion d’un mot on ne peut plus éloigné des attributs propre au langage populaire. Son pendant est le mot dièse, en usage chez nos cousins québécois. On aime. Pourquoi aucune autorité « légale » ne s’est-elle élevée quand il le fallait ? Comprenons-nous bien, il ne s’agit pas de faire une chasse aux sorcières de tous les anglicismes qui apparaissent brutalement, mais simplement de substituer aux plus hétérodoxes, et élégamment, leur interprétation en français. La politique du juste milieu ! Une recommandation aux chaînes publiques, et le bon sens irradiait immédiatement l’ensemble des médias, Un petit effort pour un grand résultat. Manquons-nous aujourd’hui, par fatigue ou par incompétence, du minimum de réaction salutaire devant le moindre obstacle ?

Sur un autre plan, on est dépité d’entendre nos autorités politiques s’exprimer à tout va en anglais, souvent d’ailleurs avec un parler qui prête à sourire. Suivant le principe incontournable édicté par le Général de Gaulle à la tête de l’État, les membres du gouvernement, et bien sûr le Président lui-même dans l’exercice de leur fonction doivent s’exprimer en français où qu’ils soient, cette marque de leur présence renforçant la puissance de leur représentativité… Mais qui le fait aujourd’hui ?

Enfin, cerise sur le gâteau, plus de deux Français sur trois sont favorables à l’affichage de leur appartenance à la communauté mondiale de la Francophonie. Que les élus montrent leur adhésion à cette heureuse famille des francophones en associant son drapeau à celui de la France (chez nous), et de l’Europe. Et pourquoi pas, demain, nos compatriotes ne se déplaceraient-ils pas partout dans le monde en portant l’épinglette de la Francophonie au revers de leur habit ?

Pour que notre langue quitte la désespérance ressentie par les Français devant tant de laisser-allers qu’elle récuse, cette enquête ouvre la voie du « comment faire ». Ne tombons pas dans le piège des habituels « Y’a qu’à ! Ils ont qu’à ! Il faut qu’on ! … », renvoyant à d’autres le courage du « faire » !

Lecteurs, actionnaire de la bonne santé de notre langue universelle, faites-nous part de votre accord, ou de vos réserves sur les points énoncés. Avec votre concours, nous améliorerons notre monde. Si nous savons agir là, demain nous saurons déplacer des montagnes ! Retrouvons le temps où nous avions l’ambition d’être les premiers !

 « Votre langue et votre culture, protégez-les comme la prunelle de vos yeux. Elles sont votre richesse, votre apanage souverain… pour le bénéfice de l’humanité. »           Jean-Paul II – Unesco 2 juin 1980

Michel Le Net : contact@republique-exemplaire.eu

Albert Salon : avenirlf@laposte.net

                                                                                                                                           1 – Sondage BVA réalisé par Internet du 16 au 21 février 2018 auprès d’un échantillon de 1 000 répondants, représentatif de la population française, âgée de 18 ans et plus.

2 – Voir sur le site : republique-exemplaire.eu, rubrique « Communiqués »

Contre les prédateurs de la langue française, que le peuple de France oppose la pérennité de ses valeurs !

Michel Le Net1 et Albert Salon2

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   L’Histoire longue nous enseigne que les peuples qui survivent sont intraitables sur leur personnalité, sur ce qui les a faits tels qu’ils sont. Deux aspects signent leur état. Le sol et l’esprit. Le premier est d’évidence. Le second relève de la conception qu’un peuple se fait de la réalité fondée sur son passé immémorial. Il nous transmet sa langue, fil d’Ariane qui nous conduit, depuis nos origines, vers le devenir que nous choisissons.  « Votre langue et votre culture, protégez-les comme la prunelle de vos yeux. Elles sont votre richesse, votre apanage souverain… Pour le bénéfice de l’humanité », déclarait Jean-Paul II à l’Unesco en 1980.

    Or, le français, âme de la personnalité nationale, subit une véritable guerre récemment intensifiée. Le 9 mai dernier, une conférence de presse inter-associative réunissait 32 associations sous le thème : « Halte à l’assassinat programmé du français ! »3 Le constat est sévère. Outre l’offense personnelle qui touche chacun d’entre nous jusqu’au tréfonds de lui-même, l’analyse révèle les composantes d’une volonté opiniâtre de détruire notre langue. Au profit d’intérêts politiques trop connus qui ne sont pas les nôtres, mais que soutiennent nombreux ceux que le philosophe Michel Serres nomme « collabos de la pub et du fric ». À l’image de la pénétration d’immigrants non contrôlés et de plus en plus revendicatifs, de l’accaparement par la finance étrangère de nos grandes entreprises et de notre patrimoine le plus prestigieux : c’est la lenteur de l’élévation de la température du bocal qui endort l’instinct de conservation de la grenouille et la fait mourir ébouillantée !

    De l’ensemble des items qui abondent dans le dossier de référence, relevons deux exemples représentatifs de ces circonstances. Laurent Lafforgue, honoré de la médaille Fields (équivalent en mathématiques du prix Nobel), avance que l’exceptionnelle qualité de l’école mathématique française procède aussi de l’exercice en français de ses travaux et de leur publication. Le monde informatisé qui progresse sans limite a pour matrice la science mathématique. Que sa maïeutique n’oublie pas ses origines ! Or – ici le propos se fait moins noble – l’ordre économique dominant, bien que déclinant, impose sa loi du plus fort. Des exemples sans nombre attestent que l’emprise de sa monnaie oblige à ses lois. Quiconque s’en éloigne doit craindre les foudres de l’intempérance. Malgré cette énorme pression, des États lucides et volontaires redressent la tête et la barre. De grandes universités chinoises abolissent l’anglais obligatoire à leurs examens d’admission. Au Pakistan itou. Alors même que, soumis ou inconscients, nous Français continuons à suivre le courant ! Drolatique ENA, où l’on enseigne à naviguer…pour s’abandonner au fil de l’eau ! Cette inconscience, pour beaucoup, tient au formatage d’une élite dirigeante par la pensée dominante d’outre-Atlantique. Pouvons-nous accorder notre confiance à ces « young leaders » qui s’enorgueillissent d’appartenir aux cercles de cette prétendue bien-pensance ? Langue unique = pensée unique, écrivait Claude Hagège…

    La France se trouve donc devant un choix crucial, urgent. Mais alors, QUI fait le choix entre la vitalité du français et son extinction, entraînant celle de la France ? Si nous ne voulons pas laisser une élite atlantiste mener à bien son entreprise d’assassinat de moins en moins subreptice, il faut interroger le peuple. Que pensent nos compatriotes de ce combat d’apparence élitiste, mais salvateur pour la pérennité de notre personnalité nationale ? Partagent-t-ils la préoccupation dont il s’agit ? Ou bien les laisse-t-elle indifférents ? La vérité n’est jamais loin des gens ordinaires, dit-on en Chine. « Le populo a des réflexes sains. Il sent où est l’intérêt du pays. Il ne se trompe pas souvent » confirme le Général de Gaulle4 Si l’on veut contrer les « forces du mal » – selon un Bush –  par un effort à sa dimension, la cause doit être partagée par le plus grand nombre de nos concitoyens. Ne soyons pas naïfs, tel est bien l’enjeu vital du moment. Tout est rapport de forces dans ce monde. Cela vaut aussi pour cette guerre-là. Il nous faut dès aujourd’hui mesurer le mécontentement populaire, afin de puiser dans sa force une riposte adéquate, à partir du propre engagement de nos Français à contribuer concrètement à la bonne santé de leur langue et de leur pays. Si les enseignements déjà recueillis, et les résultats très encourageants de la campagne « Communes de France pour la Langue française » lancée en 2012 par 32 associations pour faire voter un manifeste pour le français par de nombreux conseils municipaux, confirment qu’une volonté populaire prend au sérieux ce défi, soyons optimistes. Remémorons-nous. Il y a trois siècles – hier, à la mesure du temps – le « beau monde » européen lisait, pensait, était français. Le pouvoir régalien d’alors avait conscience de cet exceptionnel privilège de notre langue, se projetait au loin et veillait à son évolution légitime, comme au respect de ses fondamentaux. Aujourd’hui encore, notre langue est parlée par près de trois cents millions de locuteurs, dont la moitié ont moins de 30 ans. Elle est la cinquième parlée au monde. La troisième en affaires. La quatrième sur internet. La seconde au sein des organisations internationales. Quel merveilleux trésor partagé avec respect et attention sur les cinq continents ! Elle est aussi – en France plus qu’ailleurs – protégée : par la Constitution (1992 « La langue de la République est le français », introduite par les amis parlementaires de nos associations), par des lois (Toubon 1994), par des institutions, par des règlements, notamment sur la création terminologique, chapeautée par l’Académie française.

    Et nous accepterions sans broncher qu’au sein-même de sa maison-mère la France, des bafoueurs viennent la bafouer, des écervelés la décerveler ? Soyons certains que nos descendants rendront grâce à notre lucidité et à notre énergie pour la leur avoir ainsi transmise, solide et planétaire. Mais comme tout mouvement se prouve en marchant, exigeons l’application de la loi. Devenons ensemble acteurs de notre avenir.

    Et manifestons sans retenue notre engagement à cette noble entreprise !

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1 – Haut fonctionnaire honoraire. Actionnaire de République exemplaire (republique-exemplaire.eu)

2 – Ancien ambassadeur. Président d’Avenir de la langue française.

3 –  Sous l’égide d’Albert Salon – ALF – 34 bis, rue de Picpus 75012 Paris – 01 43 40 16 51) et de Georges Gastaud, président de COURRIEL.

4 – Voir ça pique ! Secouons nos neurones…, de Michel Le Net, Éditions Jean Picollec, 2017, p. 11 et l‘article « Smartphones, iPads… ; demain, on habite en Franceland ou en State of France ? », p. 53 à 60.

Penelope Fillon ou L’effet papillon

Michel Le Net*

Voila une application de la théorie du chaos appliquée au monde politique. Une erreur d’appréciation des conséquences d’un fait à l’origine plutôt banal laisse présager des effets insoupçonnés par leur amplitude. Comme le battement d’ailes d’un papillon peut engendrer une tornade au loin.

Suivant l’adage, possible faute avouée est déjà pardonnée. La hantise du combat entre l’émotion et la raison, toujours gagné par la première, est constamment présente à l’esprit de tout homme politique. Ainsi, dès les premiers signes de « l’affaire », il eut suffit à François Fillon de reconnaître qu’il est parfaitement légitime pour l’opinion publique d’être au clair sur les comportements publics de ses hauts dirigeants. Plus encore, il put s’en réjouir, reprenant à son compte la prudence de Cocteau dans Les Mariés de la Tour Eiffel : « Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d’en être l’organisateur ». Parfait serviteur de l’État, donc applicateur zélé du principe de transparence qui lui est attaché, il lui suffisait de laisser la commission d’enquête faire son travail, assurant que si quelques faiblesses parfaitement inconscientes étaient décelées dans sa conduite d’élu, sans aucune réserve, il se rallierait aux décisions prises. La question portant pour l’essentiel sur des rémunérations contestées, bien évidemment il rembourserait les montants indus. Tout en s’engageant à être plus vigilant demain. Et nos concitoyens, sensibles à tant de loyauté, enterreraient l’affaire et porteraient leur attention sur d’autres sujets. Il n’est pas trop tard pour s’engager ainsi dans la voie attendue. En son temps, Hérodote (Ve siècle av. J.-C.) sut reconnaitre ses erreurs dans son écriture du monde. Cela lui valut la notoriété qu’on lui connait aujourd’hui.

Au lieu de cela, nous avons eu droit  à ce qui devrait devenir un cas d’école en matière de malfaire dans les centres de formation politique. Un dédain affirmé pour ceux qui s’étonnent (nos compatriotes, qui s’occupent de ce qui ne les regarde pas). La mise en cause immédiate de malfaisants (qui sont-ils ?) voués par principe aux gémonies. La théorie du complot, omniprésente dans le milieu politique pour justifier l’exécrable. Le moment où intervient la contestation (ce n’est pas le sujet). Bien naïvement, pourrait-on aussi penser, pourquoi ne pas avancer l’intervention désabusée d’un de nos semblables, tel un lanceur d’alerte, blessé par quelque dérive financière condamnable. La liste est bien longue, mais arrêtons là la mise en cause des obscurs par qui le mal arrive. Demain, un conflit majeur entre les maîtres du monde demandera que l’on prenne position sur le que faire. Le président devra s’élever jusqu’aux aux cimes du pouvoir, et faire jeu égal avec les plus durs de ses partenaires. Est-il bien préparé à la confrontation ? L’habit propre à la fonction peut-il par ce fait révéler des compétences encore insoupçonnées ? L’actuelle expérience du pouvoir ne penche pas en faveur de cette option. Mais qui sait ?

Tout cela fait désordre. Mélange de privilèges qui perdurent comme la misère dans le monde, malgré leur prise de conscience et leur réduction après la nuit du 4 août 1789. Un népotisme que condamnent des États parmi les plus brillants par leur saine gestion, tel notre voisin allemand dont un représentant nous jugeait récemment, comme tant d’autres, toujours au rang des républiques bananières… Cette façon de faire est proche du cumul des mandats, heureusement aboli, par la faveur injustifiée accordée aux siens au détriment d’autres salariés en manque d’emploi. On peut penser que la rémunération d’un grand élu peut lui suffire pour les besoins d’une famille aisée. Par ailleurs, quelle épouse ne se livre-t-elle pas chaque jour bénévolement à la promotion de son époux bien-aimé… C’est par de telles injustices, criantes et répétées, mais ignorées par ceux qui doivent « montrer l’exemple » qu’un pays s’abaisse. Verra-t-on encore demain, comme on l’a tant constaté, des ministres prendre à leur coté femmes et membres de leur sang pour vaquer aux tâches administratives ? De même qu’un Président prend comme ministre la mère de ses enfants ? Ou bien n’applique pas la loi qui interdit à un membre du gouvernement d’être président de région ? Pas demain, mais aujourd’hui ces dérives doivent cesser. Sinon l’opinion publique, cette entité nouvelle dans son réel pouvoir à corriger les fautes, et nous venons de le voir sur un autre sujet majeur, aura tôt fait d’exclure à nouveau les plus hauts dirigeants, ou de les condamner sévèrement. Sur cet aspect, la lucidité populaire est surprenante. Plutarque, penseur grec de la Rome antique il y a deux mille ans avance : « La foule perce à jour même ce qui semble enfoui très profondément chez les hommes politiques, leurs caractères, leurs intentions, leurs actions et leurs vies, et ce n’est pas moins pour ses habitudes privées que publiques qu’elle aimera et admirera l’un, comme elle repoussera et dédaignera l’autre. »

L’affaire du moment, quelle que soit son échéance, aura deux conséquences. La première de faire un bond vers plus d’éthique politique. On voit mal en effet que la prochaine mandature n’assainisse pas nos mœurs à cet endroit. Aussi la confirmation du pouvoir croissant de l’opinion publique, en lieu et place de celui des représentants qu’elle a élus. Ce pouvoir s’appelle aussi le bon sens. Mais ce pouvoir a sa contrepartie, une grande lucidité sur les forces en mouvement, et l’engagement de chacun à y prendre part. Nous sommes individuellement responsables de ces comportements que nous contestons. Quelques (très) rares parlementaires d’une grande lucidité et d’un vrai courage, tels René Dosière et Charles de Courson, cherchent désespérément à nous prévenir du désastre. Nous les ignorons. En attente de l’étoile du Berger ?

Puisque notre capacité citoyenne éprise de justice se renforce de jour en jour, il nous revient, comme Diogène vrai philosophe des temps modernes, de proclamer sans détours : « Je cherche un homme… exemplaire ! » À défaut, le Cronos politique dévorera ses enfants… à l’exception de celui qui un jour nous sauvera par la vertu retrouvée.

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* République exemplaire. Site interactif : republique-exemplaire.eu

Président honoraire du Cercle d’éthique des affaires (CEA)

Auteur de La communication politique, Notes et études documentaires, 1989 et La communication gouvernementale, Éditions de l’Institut de la communication sociale (ICOS), 1985.